À voir dans la Galerie Willner Madge de l’aube de la vie, Tomlinsonus dimitrii, une nouvelle espèce d’arthropode de l’Ordovicien supérieur
Reconstitution de Tomlinsonus dimitrii : Christian McCall. © ROM. |
TORONTO, le 19 avril 2022 – Le Musée royal de l’Ontario (ROM) annonce la découverte de Tomlinsonus dimitrii le fossile d’une espèce marine extrêmement rare mise au jour près de Brechin (région du lac Simcoe dans le sud de l’Ontario). Seul spécimen connu de l’espèce, ce fossile de l’Ordovicien supérieur (environ 450 millions d’années) d’un groupe d’arthropodes aujourd’hui disparu se distingue par son état de conservation. La découverte a été décrite dans un article paru le 24 mars 2022 dans le Journal of Paleontology.
Dans la plupart des cas, seules les parties les plus solides de l’animal comme les carapaces et les os se fossilisent. Cette nouvelle espèce, qui ne comporte aucune structure minéralisée, fait donc exception à la règle. De son vivant, l’animal était entièrement constitué de tissus mous, ce qui normalement aurait dû en empêcher la préservation.
Guère plus grand qu’un index, Tomlinsonus appartient à la classe des marrellomorphes, un groupe d’arthropodes au corps mou aujourd’hui disparu dont des fossiles ont été mis au jour dans des sites plus anciens, notamment les célèbres schistes de Burgess en Colombie-Britannique. « Tomlinsonus est doté d’une tête à bouclier ornée de remarquables épines plumeuses. Cet animal étrange se déplaçait probablement sur les fonds marins vaseux à l’aide d’une paire de très longs appendices semblables à des échasses », affirme l’auteur principal de l’article Joe Moysiuk, doctorant en écologie et biologie évolutionniste à l’Université de Toronto, et membre de l’équipe du ROM. Cette espèce vivait dans les eaux peu profondes de l’océan tropical qui submergeaient à l’époque la majeure partie de l’Ontario et dont le fond était périodiquement recouvert de sédiments charriés par les tempêtes, enfouissant les organismes qui y vivaient.
« Nous avons appelé cet écosystème Paleo Pompeii », de dire George Kampouris, coauteur de l’article et technicien paléontologique indépendant. Il est également l’initiateur d’un projet de fouilles des gisements fossilifères de la région du lac Simcoe mis en œuvre en 2014. « Brechin produit des fossiles de qualité supérieure depuis une centaine d’années, mais nos travaux ont révélé le rôle joué par les violentes tempêtes dans l’enfouissement et la préservation de populations entières d’animaux dans leurs derniers moments. »
La nouvelle espèce a été découverte durant des fouilles menées dans une carrière appartenant au Groupe Tomlinson, d’où le nom du fossile. « Tomlinson nous a apporté un soutien sans précédent, affirme Kampouris. Grâce à lui, nous avons pu fouiller de grandes surfaces, strate par strate, afin de reconstituer le fond marin dans son intégralité et de recenser ces incroyables communautés récifales. »
Le projet visait, entre autres, à réunir du matériel scientifique très bien préservé afin de l’intégrer dans la collection du ROM. George Kampouris a fait don au Musée de nombreux spécimens étonnants, y compris Tomlinsonus. Si cette collection hors du commun comprend des squelettes d’animaux marins impeccablement conservés, pour la plupart des crinoïdes et des trilobites, le marrellomorphe est sans doute la découverte la plus remarquable en ce qu’il constitue le premier cas connu de préservation d’un organisme non minéralisé provenant de cette région. « La découverte de tissus mous, notamment ceux d’un animal au corps mou ressemblant à Marrella splendens prélevé dans les schistes de Burgess en Colombie-Britannique, fut une énorme surprise. Jusqu’alors, aucun fossile du genre n’avait été recensé dans les gisements de récifs peu profonds des eaux de l’est de l’Amérique du Nord de l’Ordovicien. En général, il s’agit de cas très rares, affirme Jean-Bernard Caron (Ph. D.), conservateur Richard Ivey en paléontologie des invertébrés et coauteur de l’article. La découverte d’espèces à corps mou comme Tomlinsonus contribue à la compréhension de la diversité de la vie à cette époque. »
Les scientifiques sont convaincus que Tomlinsonus comble une lacune dans l’histoire sommaire de ce groupe. « Les fossiles de marrellomorphes sont très rares. Cette nouvelle découverte marque une avancée dans la compréhension de l’évolution, de la paléobiologie et de la répartition de ce groupe », ajoute Alejandro Izquierdo Lopez, étudiant en écologie et biologie évolutionniste à l’Université de Toronto et coauteur de l’article. Les fossiles à corps mou de la région de Brechin ouvrent une rare fenêtre sur les plateaux océaniques de l’Ordovicien en Amérique du Nord. Selon les scientifiques, Brechin est un terreau très fertile pour d’autres découvertes du genre qui contribueront à l’enrichissement de la collection du ROM.
Les visiteurs sont invités à découvrir Tomlinsonus dans la section consacrée aux schistes de Burgess dans la nouvelle Galerie Willmer Madge de l’aube de la vie, qui réunit de nombreux autres tissus mous préservés. D’autres fossiles provenant de la région de Brechin sont présentés dans la section réservée aux fossiles de l’Ontario.
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RÉFÉRENCE
Moysiuk, J., Izquierdo-López, A., Kampouris, G., & Caron, J., « A new marrellomorph arthropod from southern Ontario: A rare case of soft-tissue preservation on a Late Ordovician open marine shelf » Journal of Paleontology, 1-16.
https://doi.org/10.1017/jpa.2022.11
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Le ROM
Ouvert en 1914, le Musée royal de l’Ontario fait connaître les arts, la culture et la nature du monde entier au fil des siècles. Le ROM, l’une des dix institutions culturelles les plus réputées d’Amérique du Nord, est aussi le musée le plus important et le plus complet au Canada. Ses collections de classe mondiale réunissent plus de 13 millions d’objets d’art et de spécimens naturels dans 40 galeries et salles d’exposition. Principal centre de recherche sur le terrain au pays et chef de file mondial pour ses découvertes originales, le ROM joue un rôle essentiel dans notre appréciation des arts, de la culture et de la nature. Le Musée, qui allie l’architecture de l’édifice historique et le style contemporain du Cristal Michael Lee-Chin créé par le Studio Daniel Libeskind, constitue à la fois un site d’intérêt national et une destination culturelle dynamique en plein centre de Toronto dont tous et toutes peuvent profiter.