Art, émotion et culture populaire

Kirk Hammett est connu dans le monde entier comme le guitariste principal de l'un des groupes de métal les plus populaires de tous les temps. Compte tenu des thèmes explorés par Metallica au fil des ans dans des chansons telles que Of Wolf and Man (sur un loup-garou), The Thing That Should Not Be (sur un mal cosmique piégé sous la mer) et Some Kind of Monster (sur une sorte de monstre), la révélation que l'un de ses membres est un fan de films d'horreur n'est peut-être pas la plus surprenante qui soit. Mais la collection de souvenirs que Hammett a rassemblée au fil de décennies d'acquisitions est, comme sa musique, profonde, sombre et remplie d'images terrifiantes. Il s'agit en fait de l'une des plus importantes archives d'art cinématographique classique d'horreur et de science-fiction au monde.

Hammett a passé plus de trente ans à collectionner des affiches de films rares, des œuvres d'art, des accessoires et des costumes, motivé, dit-il, par sa passion pour l'horreur et sa volonté de comprendre les gens à travers leurs films et leur musique. Le lauréat de plusieurs Grammy Awards s'est récemment entretenu avec le magazine ROM, depuis son domicile de San Francisco, au sujet de sa collection et du lien entre l'art, l'émotion et la culture populaire.

Qu'est-ce qui vous enthousiasme le plus lorsque vous montrez votre collection aux gens ?

J'ai découvert que la chose la plus étonnante pour moi est d'observer les gens, de voir comment ils réagissent à la collection et comment elle ravive leurs souvenirs, leurs émotions ou leurs sentiments. Presque toujours, lorsque les gens voient la collection, lorsqu'ils voient les affiches de films, vous entendrez "Oh, je me souviens de ça ! Oh, oui !" J'aime voir comment ma collection touche les gens sur le plan émotionnel. J'aime voir comment ma collection touche les gens sur le plan émotionnel, parce qu'elle fait de même pour moi.

Qu'est-ce qui vous a décidé à la partager avec le public ?

Je collectionne ces objets depuis toujours. Mais cela s'est accéléré au milieu des années 80. Il y a une dizaine d'années, la collection est devenue si importante, si exceptionnelle, si cool et si épique que je me suis dit : "C'est trop beau pour moi tout seul !" Elle représente plus que mes caprices de collectionneur. Elle représente la culture de l'horreur à travers le 20ème siècle. J'ai toutes ces affiches de films, ces accessoires, ces jouets, ces livres, ces œuvres d'art, et c'était trop cool pour mes seuls yeux, trop cool pour moi et mes amis.

Qu'est-ce qui vous intéresse dans les films d'horreur en particulier, par rapport à d'autres genres à la même époque ?

La chose la plus importante - et c'est en quelque sorte une révélation récente de ma part - est que les principaux films d'horreur classiques réalisés par les studios Universal dans les années 1930, à savoir Frankenstein, la momie, Dracula, et plus tard L'homme-loup, Le fantôme de l'opéra, La créature du lagon noir - cesfilms sont nos contes de fées. Ils sont l'équivalent des contes de Grimms en Europe.

Pourquoi pensez-vous qu'ils continuent à capter notre imagination ?

Cela fait partie de la culture américaine, et la raison pour laquelle ces films, ces histoires, ces thèmes sont restés si longtemps est qu'ils parlent de la condition humaine d'un point de vue psychologique, émotionnel et subconscient, de la même manière que les contes de fées. Je pense que les gens le reconnaissent et qu'ils reconnaissent la progression des histoires au cours de la centaine d'années que couvre ma collection.

Que peuvent nous apprendre les affiches elles-mêmes ?

Décennie après décennie, les affiches de cinéma ont évolué en même temps que notre culture. Il est très intéressant de voir comment ce qui était attrayant dans notre culture à l'époque se reflétait dans les affiches de films. Ce que l'on craignait à l'époque se reflétait également dans ces affiches - et pas nécessairement dans les films, mais dans les affiches. Elles sont un grand marqueur culturel. C'est une grande chose culturelle qui est presque uniquement américaine.

Est-ce qu'elles reflètent quelque chose du pays, même en dehors des films eux-mêmes ?

Oui. Prenez une affiche des années 30. À cette époque, les films les plus populaires étaient soit des romans d'amour, soit des westerns. Ainsi, beaucoup d'affiches de films d'horreur des années 30 comportent des éléments romantiques. On y voit un intérêt amoureux ou un triangle amoureux. Les affiches de films d'horreur sont donc très luxuriantes. Les choses ont changé dans les années 40 avec la Seconde Guerre mondiale. Les films d'horreur ont connu un véritable déclin au début des années 40. Au début de cette décennie, beaucoup d'affiches de films d'horreur étaient très classiques.

Dans les années 50, à l'époque de la guerre froide, il y avait beaucoup d'affiches d'horreur sur le thème du nucléaire. Beaucoup d'affiches étaient tout simplement xénophobes. Vous savez, "Les extraterrestres arrivent", sans vous dire qui sont les extraterrestres en question. Tous ces messages propagandistes [se trouvaient] dans ces affiches, et vous regardiez le film et c'était complètement différent.

Si ces films et ces affiches étaient le reflet de nos peurs, quelle est, selon vous, notre peur aujourd'hui ?

L'idée d'une force invisible qui se présente sur le pas de votre porte, qu'il s'agisse d'une maladie, d'un mauvais gouvernement, du réchauffement climatique ou de n'importe quoi d'autre, est très évidente dans le cas des zombies, et c'est pourquoi ils sont si populaires. Beaucoup de ces peurs apocalyptiques se manifestent dans les films de zombies.

Comment votre collection et votre amour de ces genres continuent-ils à influencer votre musique ?

Souvent, je regarde un film d'horreur, la scène est très intense et une petite mélodie me vient à l'esprit. En général, ce n'est pas grand-chose, et ce n'est presque jamais un riff de heavy metal. Mais ces mélodies arrivent et c'est presque comme si mon cerveau créait sa propre bande-son en permanence. L'inspiration me vient en regardant les films, en regardant les affiches, et même en ressentant l'impression que me donne un film d'horreur que j'ai vu récemment.

Vous arrive-t-il de ressentir le besoin de changer de régime cinématographique ? Peut-être regarder un feuilleton, juste pour changer un peu ? Ou est-ce que c'est toujours de l'horreur ?

Ha ! Vous savez quoi, je suis aussi vraiment accro aux films de kung-fu. Voilà ce que je regarde : Je regarde des films d'horreur, des films de kung-fu et des documentaires. Et c'est ce que je fais. Mais je n'en ai pas assez pour une collection. Il faut bien que je m'arrête quelque part.

Qu'espérez-vous que les gens retiendront de l'exposition ?

Que l'on continue à s'intéresser à ces films. Ils sont historiques à leur manière. Ils ont tellement contribué à notre culture, de tant de façons différentes. Je ne veux donc pas que les gens oublient que ces histoires, ces images, ces idées importantes ont été capturées par ces affiches. Bien sûr, beaucoup de ces films ont d'abord été des livres - Dracula et Frankenstein, par exemple - mais ce sont les scénarios de ces premières décennies du XXe siècle qui ont fait de ces personnages ce qu'ils sont aujourd'hui, c'est-à-dire la façon dont nous les voyons dans notre esprit. Je pense qu'ils sont toujours cool. L'imagerie est cool, les histoires sont cool, c'est un bon moyen de passer son temps. C'est juste un bon divertissement, propre et agréable. Enfin, pour la plupart. Il semble que les gens aient besoin d'un autre moyen de s'amuser que de regarder des écrans.

C'est vivant ! Classic Horror and Sci-Fi Art from the Kirk Hammett Collection, se déroule du 13 juillet 2019 au 2 janvier 2020. Elle est organisée par le Peabody Essex Museum, à Salem, dans le Massachusetts.